Dans la Théogonie d’Hésiode ainsi que le roman Manon Lescaut de l’abbé Prévost, deux personnages féminins se ressemblent et s’assemblent sur de multiples points : la scandaleuse Manon Lescaut nous rappelle la déesse Aphrodite. En quoi ces deux personnages féminins sont-ils à la fois similaires et différents?
Tout d’abord, Aphrodite ainsi que Manon Lescaut sont deux femmes totalement paradoxales et ambivalentes : elles peuvent être à la fois tendres, douces et charmantes («elle me parut si charmante » nous dit Des Grieux) et pourtant, si déconcertantes par leur nature séductrice et infidèle (Aphrodite reçoit en partage « les entretiens séducteurs, les ris gracieux, les doux mensonges, les charmes, les douceurs de l’amour » lorsqu’elle va siéger dans l’assemblée des dieux, selon Hésiode).
Ensuite, chacune, à sa manière et sans le vouloir, a engendré quelque chose de nouveau. En effet, Aphrodite est le premier être divin à être né d’une naissance sexuée. Manon Lescaut, elle, crée un bouleversement dans la vie honnête et paisible du jeune chevalier des Grieux : c’est le commencement d’une vie faite de mensonges, de doutes, et de déceptions. Elle change le cours de son destin et provoque « dans la suite, tous ses malheurs et les [s]iens ». D’ailleurs, Manon, au même titre qu’Aphrodite, a tout particulièrement conscience du pouvoir qu’elle possède sur la gente masculine : « elle reçut mes politesses sans paraître embarrassée », nous raconte Des Grieux.
Par ailleurs, la différence fondamentale entre ces deux séductrices est sans aucun doute leur nature, car Aphrodite est une majestueuse déesse, alors que Manon Lescaut est une simple mortelle. De plus, il semble que leurs parents respectifs n’aient pas eu les mêmes intentions envers leur enfant. En effet, les parents d’Aphrodite sont au moment de sa naissance en pleine querelle et n’ont guère l’intention de se préoccuper de leur fille. Toutefois, les parents de Manon Lescaut paraissent se soucier d’elle puisqu’ils la contraignent à aller au couvent, sans doute dans l’objectif de la protéger des tentations charnelles à laquelle celle-ci aime s’exposer : « c’était malgré elle qu’on l’envoyait au couvent, pour arrêter sans doute son penchant au plaisir», nous confie son bien-aimé.
En cela, ces deux personnages fictifs qui peuvent sembler totalement différents sont en réalité très proches de par leur comportement face aux hommes, leur caractère, ainsi que leur charme indéniable et irrésistible.
Analyse rédigée par Samantha, helléniste de 1re, dans le cadre de son portfolio