Dans le cadre du projet “Montrer la disparition, regarder l’absence”,ce mardi 11 octobre, nous avons rencontré Gérard Benguigui, président de l’Association Juive d’Angoulême et de Charente, qui nous a raconté, sous plusieurs anecdotes et témoignages, la Rafle d’Angoulême.
Tout d’abord il nous a rappelé qu’il y a 80 ans la majorité de la population ukrainienne était juive. Suite au massacre des juifs en Ukraine, cette population a disparu. La rafle, comme nous l’avait déjà expliqué
Maurice lors de la conférence précédente, s’est effectuée le 8 octobre 1942. 442 juifs (dont des enfants) ont été déportés. Ensuite le 20 janvier 1942, la
« solution finale » a été mise en place.
Il nous raconte que les juifs étaient placés sur une planche au dessus d’une fosse ; des nazis et antisémites leur tiraient dessus afin de les faire tomber dans la fosse avant de les recouvrir de terre et recommencer le processus par dessus la première couche. Cette pratique est nommé la « fosse commune » qui marque le début de la Shoah.
Gérard B. nous présente plusieurs témoignages de rescapés des camps de
concentration et victimes de la Seconde Guerre Mondiale lors de cette rafle. Nous avons donc visionné deux interview de deux de ses amis : Francine Christophe et Josie Martin.
En Charente, Francine Christophe était une survivante d’un des camps de concentration les plus rudes à l’Est de la France, le Struthof.
Le père de Francine, étant un militaire proche du gouvernement, la famille de Francine se pensait épargnée d’une potentielle déportation. Cependant, ce ne fut pas le cas. Elle est arrêtée avec sa mère en essayant de passer la ligne de démarcation à La Rochefoucauld, en Charente, le 26 juillet 1942. Âgée de seulement neuf ans alors, elle et sa famille furent déportés et séparés.
Survivante de ce camp de concentration, elle nous raconte une anecdote.
Quand les gendarmes leur ont ordonnés de quitter leur maison, chaque membre de la famille pouvait prendre un petit quelque chose, rien de conséquent. La mère de Francine prit un carré de chocolat et lui dit qu’elles pourraient le manger seulement si l’une d’entre elles se retrouvait un jour au sol à l’agonie.
Pendant leur déportation, une femme, bien maigre, était néanmoins enceinte et arrivait à terme. Et Francine se souvient de ce que lui a dit sa mère à ce moment là : « Si tu veux bien Francine, je vais utiliser notre carré de chocolat pour donner un petit peu de force à la femme qui accouche ».
Le bébé est alors né sans même crier ou pleurer, il est né en silence.
Plusieurs années plus tard, Francine donnait des conférences pour témoigner des atrocités qu’elle vécut enfant, pour rencontrer d’autres témoins de cette guerre et de ce massacre. Elle nous raconte, qu’à la fin d’une conférence, une femme, une psychologue, se leva et lui tendit un carré de chocolat en lui disant : « Je suis le bébé ».
C’est comme ça que Francine clôt son témoignage touchant et surprenant.
Après la vidéo du témoignage de Francine passée, Monsieur Benguigui nous rappelle qu’à partir de 1940 les juifs sont ostracisés :
– ils n’ont plus le droit de faire certains travaux et n’ont alors plus de revenus
– ils peuvent être expulsés de leur foyer à tout moment
– les enfants sont déscolarisés
– ils sont obligés de porter l’étoile jaune
C’est alors qu’en Juin 1940 la France est envahie et l’administration allemande, qui gouverne la France, donne l’ordre d’arrêter les juifs dont ceux de Charente.
Le 20 Janvier 1942 l’État Major Nazi décide de la Solution Finale : l’extermination de toute la population juive dans le monde.
L’extermination se fera par camps de concentration et camps d’extermination.
Les camps de concentration sont des usines, le plus souvent installées en Pologne, dans lesquels les déportés exécutent un travail forcé avec un « repas » par jour, si on peut appeler un morceau de pain et une cuillère de soupe ainsi. Les plus connus sont Auschwitz et Birkenau. (signifiant « bois de boulot »). D’après Gérard Benguigui, des scientifiques ont conclu qu’avec un mode de vie semblable à celui des déportés dans les camps, la durée de vie n’était pas supérieure à 15 jours. Monsieur Benguigui nous explique que ceux qui survivaient plus longtemps, tenaient du miracle.
Au contraire, les camps d’extermination étaient des lieux, où celui qui y entrait était sûr de ne plus ressortir car, tout de suite arrivé sur place, les déportés étaient rasés et déshabillés puis emmenés dans un bâtiment nommé « chambre à gaz ».
Notre intervenant nous avoue avoir été fortement déçu quand il a su que la plupart du gaz de ces chambres était importé des usines de l’Oise (60), un département de son enfance.
Il faut savoir qu’avant de monter dans les chariots à bestiaux, destination les camps de concentration ou d’extermination, les familles étaient séparées, les parents n’étaient plus avec leurs enfants qu’on faisait espérer en leur racontant qu’ils reverraient leurs parents. Le témoignage de Robert Frank en est un exemple poignant. Ces parents étaient tous deux juifs immigrés et il a été séparé d’eux et placé en orphelinat car il avait la nationalité française. Il recherchera ses parents longtemps en se battant pour trouver une preuve de vie mais ses deux parents étaient disparus dans les camps de concentrations et il ne l’admettra que très tardivement.
Ainsi, 66 % des morts pendant la Seconde Guerre Mondiale étaient des juifs alors que seulement 0.3 % de la population mondiale était juive. Un bilan conséquent et significatif.
Monsieur Benguigui cite plusieurs survivants de la période 39-45 :
-José El Pubière qui a vu son père se faire tuer devant ses yeux dans un camp de concentration à 15 ans. -Robert Frank
-Andrée Gros Duruisseau, résistante et survivante charentaise d’un camp de
concentration.
-Josie Martin, cachée en Charente et juive d’origine allemande.
Gérard Benguigui nous fait part de l’anecdote amusante de Josie lorsqu’elle était en primaire au début de la guerre pendant les années 41-42.
Madame Martin racontait que pendant la guerre elle était très proche de sa maîtresse d’école alors juive. Cette dernière tombe amoureuse d’un garde allemand, pour pouvoir lui parler sans qu’ils soient vus ensemble, ils échangent à travers un mur qui les sépare. Cependant elle est accompagnée de Josie qui sert de traductrice pour les paroles du garde.
Par la suite, Josie Martin se cache en Charente, elle rencontre sœur Saint-Cybard qui crée et dirige un réseau de résistance.
Aujourd’hui Josie s’appelle Josie Martin, elle a abandonnée le nom Levi très courant dans la population juive (avec le nom Cohen). Elle habite aux Etats-Unis et a écrit un livre autobiographique, “Ne dit jamais ton nom”.
Nous avons appris que le Conservatoire d’Angoulême était un lieu beaucoup moins joyeux et culturel avant d’être consacré à l’apprentissage de la musique.
En effet, l’officier de Vichy y a réuni les juifs dans le conservatoire pour une rafle radicale.
des lectures pour approfondir → “Si c’est un homme” -Primo Levi
→ “Ne dit jamais ton nom” -Josie Martin
d’après les notes de Yaqîn, Ambre et Lucie
élèves de 1ère spé arts plastiques